jeudi 22 septembre 2011

La Croixille

La Croixille en 1693



En 1694, Mathieu BIGOT, curé de La Croixille (actuellement département de la Mayenne), décide de porter sur le registre paroissial des baptêmes, mariages et sépultures : " Les Choses arrivées et qui sont dignes de remarques en l'année 1693 ".
Il raconte sur cinq pages les événements qui lui paraissent importants : les cours des monnaies, la guerre de la ligue des Augsbourg, le passage des troupes, les épidémies et la disette. La France, seule, face à toutes les autres puissances européennes est en guerre. L'attitude du roi, Louis XIV qui, après la paix de NIMEGUE en 1678, charge ses cours souveraines de Metz, Besançon et d'Alsace, de statuer sur ses prétentions territoriales. Et, ces dernières, instituent, à cet effet, des " chambres de réunion " qui décident, bien entendu, en faveur de leur roi et lui adjugent de vastes domaines : Deux-Ponts, Sarrebrück et la principauté de Montbéliard. Les autres puissances n'admettent pas ces conquêtes en temps de paix. A ces motifs de tensions, il faut ajouter la révocation de l'Edit de Nantes en 1685 qui interdit aux protestants de pratiquer leur religion. Tous les protestants d'Europe sont mécontents. C'est à cette époque que Guillaume III d'Angleterre rejoint les ennemis de la France.
Début du texte.

L'on ne cueillit que fort peu de vin qui ne valait rien et par ainsi on en a peu bu, tant de vieil que de nouveau. Le vieil vin d'Anjou blanc valait 30 sols le pot à Laval, la pipe de vin blanc a été vendue, à Laval, 300 ? ?. Le blé a valu 42 ? ? le boisseau à ce que l'on m'a dit, moulu franc. La guerre, qui a commencé il y a environ cinq ans, dure encore et est plus cruelle tant sur mer que par terre qu'elle n'était au commencement. C'est chose visible que Dieu des Armées combat pour nous car, sans une assitance divine, Messire le Roi du Christianisme, je veux dire notre Roi Louis XIV ne pouvait pas résister à tant de puissances qui sont liguées contre lui. 

Ces puissances dont l'Angleterre, La Hollande, L'empereur et tous les souverains d'Allemagne, l'espagnol, le Duc de Savoie, le liégeois et encore beaucoup d'autres provinces. et, tant s'en faut qu'ils aient l'avantage sur nous qu'au contraire notre généreux monarque fait tous les jours de nouvelle conquêtes sur les ennemis. L'on craint, cette année, que Guillaume de Nassau, Prince d'Orange,( gendre de Jacques STUART, Roi d'Angleterre qui a été déposé par ledit De Nassau) qui règne en Angleterre il y a quatre ans, ne fasse une descente en France par le Normandie ou par la Bretagne. C'est pourquoi plus de 40 000 hommes de cavalerie et d'infanterie sont descendus pour garder les côtes. Monseigneur le Duc d'Orléans, frère unique du Roi est venu en personne à Vitré et y est arrivé le dimanche dernier jour de mai. Et est allé visiter tous les ports de mer et revient, de partout où il va, à Vitré, où il tient sa cour et a fait un camp proche dudit Vitré où il y a environ 14000 hommes. Le mardi deuxième jour de juin 1693, il passa par ici un bataillon de 800 suisses qui allèrent à Fougères coucher. le même jour il arriva ici un bataillon du Régiment de Vexin composé de 800 hommes sans les chevaux qui étaient au nombre d'environ 100 avec les mulets, aussi il fallait encore cinq harnais pour mener leurs bagages qui demeurèrent ici et couchèrent tous dans le bourg et aux villages de la Boisardière et du Boisquet. car on ne voulut point les envoyer dans les villages car ils auraient tout fourragé et pillé. Mais quelque précaution et soins que prirent les officiers, les soldats allèrent néanmoins à la picorée par toute la paroisse et circonvoisines. L'on fut obligé den mettre coucher 150 dans l'église et 50 dans le chapelle du bas cimetière, 50 dans la grange du presbytère, sans quatre capitaines et tout leur train qui était de 66 tant hommes que bêtes. Les habitants avaient soins de leur fournir du feu, du bois, de la chandelle, de l'eau, du sel, du poivre et du vinaigre. Quant à la viande, cidre, il y avait l'estapier, qui était dans la maison de la Chapelle Saint-Jacques, qui les fournissait aussi bien que le foin et l'avoine pour les chevaux et mulets. Ce bataillon s'en alla le mercredi au marin troisième dudit mois.Et à l'aprèsdinée dudit jour arriva une autre bataillon , aussi nombreux que le premier, qui était du régiment des vaisseaux, que l'on reçu et, furent, lesdits soldats, logés comme les prédédents.. Ce bataillon partit le vendredi cinquième dudit mois. Et à l'aprèsdinée arriva un autre bataillon dudit régiment des vaisseaux et fut logé et reçu comme le précédent ; ce troisième bataillon partit le vendredi cinquième dudit mois et, à l'aprèsdinée, arriva une autre bataillon du même régiment des vaisseaux et fut reçu et logé comme les précédents et partit le samedi matin sixième dudit mois de juin 1693, tellement que, pendant toute la semaine, les habitants furent occupés à servir lesdits soldats dans le bourg. Les pardons du matin, de midi et du soir n'étaient point sonnés car le cloche ne servait que pour sonner le tocsin à toutes les alarmes qui arrivaient. Et il en arrive tous les jours, tantôt quatre tantôt dix, depuis le deuxième jour de juin jusqu'à aujourd'hui vingt-cinquième, auxquelles il faut tout fournir.

Le cours de la monnaie change presque tous les trois mois car les écus et autres espèces ont été rebattus et on valu tantôt trois livres 5 sols, tantôt 3 £ 4 et tantôt 3 £ 2 et les autres pièces au-dessous à proportion.
Le roi a fait une déclaration par laquelle il ordonne aux Evêques d'obliger les curés de leur diocèse de donner une exacte déclaration de la quantité de grains de toutes espèces qu'ils ont recueillis de leurs dîmes avec le nom des habitants qui paient la dîme et le lieu ou village où ils demeurent. C'est afin d'obliger les curés et autres, qui ont quantité de grains, de les mener au marché et empêcher que l'on ne fasse des magasins.
Sur la fin de la campagne de cette année, les anglais avec les hollandais sont venus à Saint-Malo et ont construit une certaine machine infernale proche la muraille de la ville, à dessein de la brûler. Ce qui eut arrivé en effet si elle eut fait tout le désordre qu'elle eut pu faire.
Car on dit qu'il n'eut demeuré pierre sur pierre de toute le ville de Saint-Malo et que l'on eut dit : " Voilà où était Saint-Malo ! " Mais Dieu la conserva, il n'y eut que fort peu de débris. Je n'ai pu savoir de quoi était composé cette funeste machine mais l'on m'a dit que si on en avait mis un morceau contre une muraille avec du feu, la muraille brûlerait comme une allumette soufrée après que l'on y a mis le feu. On dit que cette machine coûte 2 400 000 £ ; on menace encore les côtes de Bretagne et de Normandie de pareilles invasions pour l'année prochaine.
Le blé et le vin ont été bien chers cette année. Je prie Dieu qu'il nous regarde en pitié et qu'il nous donne une bonne et solide paix. C'est pourquoi demandons la lui dévotement et lui disons : "
Da Pacem, Domine, In diebus Nostris ...

La cherté du blé, du vin et même de la viande continue aussi bien que la guerre et les victoires de notre vaillant monarque qui a pris plusieurs villes, entre autres, Palamos ? ?, Gyvonne et quelques autres qui m'occuperaient trop longtemps si j'entreprenais de tout écrire.
Je vous dirai seulement en passant que le capitaine Jean Bart qui n'était, cy-devant, que simple matelot natif de la ville de Dunkerque, et qui s'est signalé sur mer par ses belle actions, en qui le Roi de France a beaucoup de confiance. Ayant aperçu l'amiral des hollandais accompagné de plus de douze navires de haut bord et de plusieurs autres moindres qui conduisaient 120 vaisseaux chargés de blé que le Roi du Danemark envoyait au Roi de France et que les Hollandais avait prix, Jean Bart partit du port de Dunkerque, avec six vaisseaux seulement, alla attaquer l'amiral, l'accrocha, le roula à fond avec deux autres, en emmena deux autres avec les 120 vaisseaux chargés de blé et le reste des autres vaisseaux hollandais s'enfuirent.
Les louis qui ne valaient que 3 livres valent maintenant 3 livres 12 sols et les louis d'or 14 livres. La sécheresse a été si grande cette année que les moulins ne pouvaient moudre faute d'eau et l'on a été obligé d'aller jusqu'à Laval pour avoir de la farine. La cherté du blé a été si grande par delà Le Mans et à Paris que nous avons appris que le pain valait 7 sols la livre, poids de seize onces, à Paris et il a tant passé de pauvres par içi qui abandonnaient leur pays que nous en avons vu passer par ce bourg jusqu'à 120 par jour.
Les maladies ont été si fortes que l'on nous a mandé que le tiers du monde s'était mort à Paris, à Tours et en tous les pays hauts, partie de faim, partie de maladie. Il se traîne, dans cette paroisse, des fièvres continues dont les uns meurent et les autres en guérissent mais ils sont si longtemps à se rétablir. L'on en promet beaucoup cet hiver, si je suis toujours en vie, je vous laisserai par écrit ce qui sera arrivé.
Dieu nous conserve, ce 14 août 1694.
Nos ennemis, c'est-à-dire les anglais, le espagnols et les hollandais continuent à rôder le long des côtes de la Normandie et de la Bretagne. On les voit souvent proches de la ville de Saint-Malo laquelle ils tentent de brûler entièrement. Mais, Dieu aidant, leurs efforts seront vains d'autant que notre roi l'a si bien fait fortifier de citadelles et de canons qu'il est impossible que les ennmis puissent l'approcher. Les malouins ont néammoins peur car ils ont tout ôté de leurs maisons et n'y est rien resté que les hommes qui sont capables de repousser l'ennemi. L'on nous a dit qu'il y avait trois pipes d'eau, en chaque maison, toutes prêtes pour éteindre le feu si, par quelque accident funeste, il y était mis. Le Hâvre de grâce a aussi été attaqué par leur machine, semblable à celle qu'ils avaient voulu faire jouer l'an passé devant Saint-Malo, n'ayant pu faire son effet, il n'y eu que fort peur de désordre. fin du texte

    Quelques commentaires en désordre pour essayer de comprendre !!!Les trois fléaux de l'époque étaient ceux de l'apocalypse :
    la peste, la guerre, et la famine
    .  
    a fame, peste et bello, libera nos domine !

  • Dieppe était un port de guerre réduit à ses anciennes fortifications.
  • Saint-Malo, grand port de guerre avait ses forts détachés et même, jusqu'en 1695, un amiral. Pour les bombardements des ports, on utilisait alors de lourds bâtiments construits en bois et en maçonnerie appelés galiotes à bombes.
  • Les dragons étaient à la foi un corps d'infanterie et de cavalerie. En 1678, Michel LE TELLIER, Marquis de Louvois, Ministre de la Guerre, porte à quatorze le nombre des régiments de dragons avec un effectif de plus de dix mille hommes.
  • Epidémies et famines - celles-ci, tributaires des récoltes et des intempéries- sévirent jusqu'à la fin du 18 ème siècles. L'une des plus terribles famines arriva pendant l'hiver 1661-1662. Des bateaux chargés de blé et partis de Dantzig en Pologne remontèrent la Mayenne. Parmi les plus atroces famines sur lesquelles des témoignages abondent, il faut citer celle de 1693, 1709, 1739, 1752, 1770 et 1785.
    Lors de la disette de 1693, le contrôleur général des finances : Pontchartrain, fit recenser, à la fois, les quantités de grains et les bouches à nourrir
  • En 1946, l'historien Meuvret a lancé la fameuse théorie des crises de subsistances. La véritable crise démographique résulte d'une série d'accidents météorologiques et notamment les étés pluvieux.
    Les récoltes médiocres successives sont mal conservées, elles entraînent un augmentation des prix du blé puis du pain. Ces augmentations de la nourriture provoquent la disette et la mortalité. En fait c'est plus la cherté de la nourriture qui affame le petit peuple que l'absence de denrées.
    Le petit peuple se jette sur des nourritures médiocres ou infectes (farines douteuses, charognes, herbes). Cette mauvaise alimentation provoque des épidémies digestives. A toutes ces difficultés locales, il faut ajouter la propogation des épidémies par les mendiants, les colporteurs et surtout les soldats. Ce qui rend la guerre redoutable, ce ne sont pas les faits de guerre proprement dits, mais bien plus la désorganisation de la vie rurale et la propagation des épidémies. Tous les nombreux régiments successifs qui séjournent à la Croixille vivent sur la paroisse. Ils consomment tous les grains des pauvres paysans qui ne peuvent même pas conserver ceux nécessaires à l'ensemencement de l'année suivante. Les soldats doivent être servis, les fourrages servent à la nourriture des chevaux. Toutes ces perturbations empêchent les paysans de se consacrer à la vie agricole. Ces importants mouvements de troupes dans cette partie du Bas-Maine a certainement contribué à l'augmentation de la mortalité de 1693.
  • Les galères, en qui se perpétuaient le type de navire à rames de l'antiquité, ne servaient guère que sur la mer Méditerranée. Elles avaient pour quartier général Marseille où résidait l'intendant des galères. Elles allaient en même temps à la voile et à la rame. Les rames très longues, environ quatre mètres, étaient manoeuvrées par six voire sept ou huit rameurs. La peine la plus sévère, après la peine de mort, était la condamnation aux galères. Le Roi de France recrutaient ses galériens auprès des Tribunaux qui condamnèrent d'abord les criminels puis les petits délinquants, les faux-sauniers, les contrebandiers, les déserteurs, les mendiants, les vagabonds, les révoltés contre les nouveaux impôts. Colbert intervint auprès des juges : "  Le Roi m'a commandé de vous écrire ces lignes de sa part pour vous dire que, Sa Majesté désirant rétablir le corps des galères et en fortifier la chiourme par toutes sortes de moyens, est que vous teniez la main à ce que votre compagnie y condamne le plus grand nombre de coupables qu'il se pourra et que l'on convertisse même la peine de mort en celle des galères."
  • PARIS et LE MANS : La population de ces deux villes peut être appréciée d'après les éléments suivants.
  • La population française totale s'élevait, à cette époque, à environ 25 millions de sujets divisée en trois castes ayant leurs lois propres : 130 000 prêtres et moines qui constituaient le clergé, 140 000 nobles, et plus de 24 000 000 de pauvres ou bourgeois qui composaient le tiers état.
  • Tiers Etat : La plus grande partie de ce tiers ne porte, dans les actes, aucune qualification. Les hommes qui se distinguaient par leur compétence en quelque domaine étaient appelés "  maître ", par leur relative puissance économique, " sire " au début du XVII siècle puis " honorable homme " et enfin " sieur " ou " monsieur " à la faim du XVIII ème siècle.. Une élite du tiers état atteignait les titres de " noble homme ", " noble écuyer ", souvent accompagnés d'un nom de terre, et usaient d'armoiries timbrées. (Que sais ? N° 147 Histoire de la Bretagne par Henri Waquet et Régis de Saint-Jouan Presses universitaires de France) : Les ruraux, les pauvres constituaient à eux seuls les 9/10ème de la population. En 1675, la population du royaume était proche de 20 000 000 d'habitants dont 18 000 000 de paysans. (En 1700 Vauban estime la population à 19 000 000) Ces derniers comprenaient une minorité de cultivateurs aisés. Les laboureurs possédaient charrue, bêtes de labour et un cheptel important. Au-dessous d'eux venaient les closiers ou bordagers qui exploitaient les closeries et les bordages. De condition le plus souvent modeste, ils disposaient de trop peu de terre pour vivre convenablement. Enfin, les journaliers, misérables et accablés d'enfants travaillaient à la journée chez les laboureurs. Ils se nourrissaient de pain, de lard, de rilles et de beurre, le tout arrosé de cidre. Le sol était peu fertile, il fallait pratiquer une jachère prolongée, en moyenne six ans et jusqu'à 9 ou 10 ans pour que les terres les plus froides. L'élevage constituait, pourtant, une partie importante de l'activité des paysans laborieux. l'obligation de laisser la terre reposer aboutissait à la poussée de grandes brières où l'on mettait des quantités de bestiaux : boeufs, porcs, chèvres, moutons, ces derniers élevés pour leur laine.
  • Si au Moyen-Age, une grande partie de l'élection de Laval était couverte de Landes, d'où les noms de villages : Juvigné-des-Landes, Saint-Pierre-des-Landes, Saint-Hilaires-des-Landes ; trois siècles après, on cultivait principalement le seigle et le blé noir (sarrasin). Le blé n'était récolté que sur les terres les plus riches. Les plantes industrielles : lin et chanvre avaient une grande diffusion et servaient à alimenter les tissages. On trouvait un rouet et un métier à tisser dans presque toutes les fermes. Dans de nombreux actes de mariages, la jeune mariée exerce la profession de fileuse. Pourtant cette activité ne devait pas rapporter gros : " le fil et le bétail ne valent sol ". Les longues veillées d'hiver étaient éclairées par un mince lumignon : l'oribus, chandelle jaunâtre de résine qui brûlait en grésillant. Le petit peuple ne connaissait en effet que la chandelle ou la lampe ancienne, qui avait pour mèche une pincée d'étoupes. (partie la plus grossière de la filasse de chanvre ou de lin). Seule la messe du dimanche introduisait un peu de lumière dans cette vie rude et sombre. A l'exception de quelques grandes routes, les chemins de traverse étaient impraticables.
    Pour se déplacer à pied, les paysans utilisaient les rotes, sentiers qui longent les champs et traversent les haies par des brèches. De toutes les façons, les transports étaient très lents. Il fallait, par exemple, 14 jours pour aller de Paris à Bordaux à bord d'une voiture publique
  • Selon un dénombrement réalisé en 1761, les 562 villes et villages de la province du Maine comprenaient 103 185 feux soit environ 434000 habitants. La ville du Mans pouvait avoir, en 1693, 14 000 habitants contre 5000 environ au Moyen-Age.
  • Paris constituait, au Moyen-Age, une agglomération de 200 000 habitants.
    IMPOTS ET TAXES
  • La taille
    La taille réelle assise sur la terre et la taille personnelle frappait les revenus Dans les pays d'Etats, c'étaient les états qui répartissaient la taille entre les paroisses de la province ; dans les pays d'élection, c'était l'intendant. La taille, répartitie entre les contribuables à raison de leurs facultés présumées, était perçue par des collecteurs nommés par l'assemblée des paysans. Pour assurer la rentrée de l'impôt, tous les habitants aisés d'unvillage étaient solidaires vis-à-vis du Trésor.
    La capitation
    Impôt institué en 1695, il était payé par tête. La dîme

    La gabelle Impôt sur le sel.
  • La Croixille, paroisse du Maine, province de grande gabelle, est limitrophe de la Bretagne, province de franc salé. L'énorme disproportion entre le prix du sel dans les deux provinces entraînait, sur le frontière constituée par la rivière de La Vilaine, une contrebande et une guérilla perpétuelle entre les gabelous et les faux-saulniers et ce, malgré les rigueurs de la loi.
  • Lorsque le Bretagne se donna librement à la France et accepta d'y être incorporée, ce fut sous la condition que ses privilèges, droits et coutumes ne seraient point changés. L'impôt sur le sel ne lui a donc pas été appliqué. C'est ainsi que, quand le sel valait 11 à 13 sols la livre à La Croixille, il ne valait, dans la paroisse limitrophe qu'un sol. En d'autres termes, le sel se payait, à La Croixille, 55 à 60 £ le quintal alors que sur l'autre rive de la Vilaine, en Bretagne, Pays franc, il ne valait que 2 à 7 £.
    Le Roi confiait le recouvrement de l'impôt sur le sel à une compagnie de traitants :
  • La Ferme ou Gabelle.Cette dernière payait au Roi une somme fixe et exploitait ensuite les sujets comme bon lui semblait.
    Pour tirer le maximum de profit, la ferme multipliait les visites domiciliaires et utilisait tous les procédés vexatoires. Le contribuable n'était pas libre d'acheter la quantité de sel qui lui convenait : la ferme fixait ce qui devait lui être acheté. Cette quantité minimale s'appelait le Sel de devoir . Certaines catégories de personnes privilégiées jouissaient du droit de " franc salé " et recevaient le sel gratuitement. Elles pouvaient même recevoir la valeur en argent du sel. qu'elles ne voulaient pas utiliser.
  • Le faux saulnier était un contrebandier qui allait acheter, en Bretagne, sur l'autre rive de la Vilaine, du sel qu'il revendait dans le Maine, après l'avoir fait passer en fraude sans payer la gabelle. Il encourait la condamnation aux galères.
  • Sous Louis XVI , la situation n'avait pas changée. En Bretagne, la livre de sel coûtait au plus un liard et demi (3/8 sous) quand dans le Maine " pays de gabelle ", elle se payait 12 à 13 sous ; d'où la frequence de la contrebande ou " faux-saunage " (Que sais ? N° 147 Histoire de la Bretagne par Henri Waquet et Régis de Saint-Jouan Presses universitaires de France) Le liard était une monnaie en cuivre qui valait le quart d'un sous. Les gabeleurs, en bas-mainiot " les gabeleux " étaient les commis de la ferme. Ils étaient notamment chargés de recouvrer la gabelle.


LES LIBERTÉS PUBLIQUES SOUS L’ANCIEN RÉGIME

Les communautés de villages.
Les villages ont eu, sous l’ancien régime, une sorte d’organisation communale. Les dimanche, à la sortie de la messe, tous les chefs de famille se réunissaient pour délibérer sur les affaires de la paroisse. Il n’y avait pas de conseil municipal mais une assemblée générale. Cette dernière élisait une collecteur d’impôt pour lever la taille et un syndic pou l’administration.
L'église de La Croixille dans le Bas-Maine


Ainsi en 1764, l’assemblée générale de la Croixille a élu pour collecteur François MOREAU et René PIRAULT « pour chacun du tiers des impositions ». Malheureusement ces deux collecteurs ne jouissent d’aucune indépendance. La royauté n’a poussé les paysans à s’organiser en communauté que pour assurer, entre eux, une solidarité pour le paiement de la taille.
Le seigneur de la Paroisse Messire Coezard de Couasnon ne faisait pas partie de cette assemblée générale qui se réunissait au cimetière, alors situé autour de l’église. Mais il pesait sur cette assemblée de tout le poids de son influence, de sa fortune, de ses privilèges et de ses droits féodaux. 

L’autorité véritable est détenue pas l’intendant de Tours qui, placé comme représentant du Roi à la tête de la généralité a la haute main sur toutes les activités des provinces de Touraine, d’Anjou et du Maine : justice, impositions, agriculture, industrie, commerce, routes etc. (Cf Histoire du Maine par F. DORNIC PUF Que sais-je? P.79).
Le subdélégué, simple agent de l’intendant dont dépend la paroisse de La Croixille est chargé de l’élection de Laval (Bas-Maine)

Ensuite l’intendant, ou plutôt son subdélégué, exerçait sur l’assemblée paroissiale la plus dure tutelle administrative. Il fallait son autorisation pour l’engagement d’une dépense de quelques dizaines de livres. Il désignait les candidats de son choix aux suffrages de l’assemblée, cassait les élections qui lui déplaisaient, nommaient les collecteurs et le syndic, faisaient marcher ceux-ci à son gré. En cas de résistance, il les mettait à l’amende ou les emprisonnait  exigeait de la communauté des paysans la prime due à la marée chaussée qui les avait arrêtés.

Charges qui pèsent sur les paysans :
Guillaume Boutruche s’est marié, à l’église de la Croixille, à l’âge de 30 ans le 20 mai 1763 avec Marie EPRON, douze ans plus jeune que lui. Il travaille avec sa mère Charlotte COTTEREAU Veuve de Laurent BOUTRUCHE sur la métairie de la Touche. Sa situation de métayer ( « paysan à mi-fruit » ») sur les terres de Messire Coezard de Couasnon est probablement moins misérable que celle de ses congénères si l’on compare les rôles de la taille et de la capitation de l’année 1764 : après la veuve TAFFOREAU, c’est la veuve BOUTRUCHE qui paie le plus.





Taille
Capitation
Noms
Adresses
livres
sols
deniers
livres
sols
deniers
Laurent TAFFOREAU
L'Oisonnais
3
12


2
8


Veuve Pierre GENOUEL
Au bourg


1








Veuve Laurent BOUTRUCHE et son fils Guillaume
Métayer à la Touche
28




18
13
6
Veuve Gervais CHARLAND Jeanne, Julien CHARLAND et ses enfants
La Fleuronnais
8
8


5
12


Veuve Julien GRENOUX
La Bourdonnière


1
10
1




Veuve LE ROUGE morte
La Rebouillais












Veuve Pierre JOUET et son fils
Au bourg et pour ses fermes
10
18


7
5
6
Veuve François MOINE
Au bourg
25
9


16
19
6
Veuve GUESDON
La Bedoyère
21
5


14
3
6
Veuve EPRON
La Desmerie
33
12


22
8


Louis JOURDAN
Lambourgerie
12
10


8
6
9
Laurent TAFFOREAU le jeune
Moulin Oury
14




9
6
9
Veuve François EPRON
Closière des Beausses
16
14


11
2
9
Total pour toute la paroisse
en livres, sols et deniers
2665
19
6
1775
16
5


















































































































































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